Plus de protéines animales, moins de mortalité chez les personnes âgées (Article de synthèse)

Les auteurs de cette étude avaient formulé l’hypothèse selon laquelle les protéines végétales, mais pas les protéines animales, seraient inversement associées à la mortalité. Une présomption battue en brèche par l’analyse des données de l’étude InCHIANTI qui montre… tout le contraire !

Les populations âgées ont en général du mal à atteindre les apports recommandés en protéines, plus élevés pour leur tranche d’âge. Or, chez les plus de 65 ans, plus l’apport en protéines totales est faible, plus la mortalité est élevée. Mais, lorsque l’on atteint un âge honorable, toutes les protéines, animales comme végétales, se valent-elles ? Ce travail visait à répondre à cette question en évaluant l’association entre l’apport en protéines animales et végétales et la mortalité toutes causes confondues, cardiovasculaire et cancéreuse.

InCHIANTI Study : une étude de cohorte prospective

Pour ce faire, les auteurs ont repris l’étude de cohorte prospective InCHIANTI (Invecchiare in Chianti, aging in the Chianti area) et analysé les données de 1 139 personnes âgées vivant en communauté (âge moyen 75 ans +/- 8 ans, 56 % de femmes) en Toscane (Italie) et qui avaient été suivis 20 années durant. Leurs apports alimentaires avaient été évalués à l’aide de questionnaires de fréquence alimentaire et leurs informations cliniques collectées à cinq reprises au cours du suivi. Les apports en protéines ont été exprimés en pourcentage de l’énergie totale et classés en quintiles.

Quelles protéines sont consommées par nos aînés ?

La consommation quotidienne moyenne de protéines totales de la cohorte était de 74 g/j, soit 1,1 g/kg de poids corporel/j. Globalement, 63 % de l’apport total en protéines reposait sur les protéines animales, issues à 26 % de produits laitiers, 26 % de produits carnés transformés, 20 % de viande rouge, 7,7 % de poisson et fruits de mer, 6,3 % de poulet, 2,7 % d’œufs, le reste provenant d’autres viandes. Les protéines végétales étaient avant tout issues de céréales (73 %) et dans une bien moindre mesure de légumes (11,4 %), fruits et noix (9,0 %) et légumineuses (5,3 %).

Le profil des plus gros consommateurs de protéines (= quintile le plus élevé de l’apport en protéines totales, en pourcentage de l’énergie totale) ? Des femmes, moins éduquées avec un diabète. Ces consommatrices avaient tendance à consommer davantage de viande et de produits laitiers, de poisson et fruits de mer, et moins de fruits, de céréales et d’alcool. Elles présentaient aussi un score de régime méditerranéen plus faible que les petits consommateurs de protéines (quintile le plus faible).

Protéines et mortalité

Pendant les 20 années de suivi (12 ans en moyenne), 811 décès sont survenus dont 292 d’origine cardiovasculaire et 151 liés au cancer. En accord avec d’autres études réalisées chez des adultes âgés (bien qu’à la limite de la significativité statistique), les auteurs retrouvent une association inverse entre l’apport en protéines totales et la mortalité toutes causes confondues. L’apport en protéines animales était également inversement associé à la mortalité toutes causes confondues (HR par 1% d’augmentation de l’énergie totale provenant des protéines =0,96 ; IC 95% : 0,93-0,99), de même qu’à la mortalité cardiovasculaire (HR par 1% d’augmentation de l’énergie totale provenant des protéines = 0,93 ; IC 95% : 0,87-0,98).

L’apport en protéines végétales était pour sa part sans lien avec la mortalité, ce qui pourrait tenir au fait que les protéines végétales provenaient essentiellement de céréales. A l’inverse, lorsque les légumineuses et les légumes secs représentaient 25 % des protéines végétales comme dans certaines études asiatiques, une association inverse entre les protéines végétales et la mortalité toutes causes confondues était observée.

Enfin, concernant la mortalité par cancer, ni les apports en protéines totales, ni ceux en protéines animales, ni ceux en protéines végétales n’étaient associés à ces décès. Cependant, la taille relativement faible de l’échantillon et la faible incidence des décès liés au cancer ont pu compromettre la puissance statistique de cette analyse.

Des effets liés à la bonne qualité des protéines animales ?

Ainsi, contrairement aux attentes (et hypothèses de départ) des auteurs, les protéines animales étaient inversement associées à la mortalité toutes causes confondues et cardiovasculaire chez les personnes âgées. Plusieurs pistes d’explication liées aux caractéristiques intrinsèques des protéines animales (profil des acides aminés, digestibilité) sont avancées : effets protecteurs sur la force musculaire, la fragilité, la sarcopénie ou les réponses immunitaires ; effet bénéfique sur la force musculaire, elle-même inversement associée à la mortalité toutes causes confondues. Néanmoins, ces résultats pourraient être affectés par le biais du survivant[1] (recrutement biaisé ne retenant que des sujets ayant déjà atteint un âge honorable… et laissant donc de côté ceux morts précocement), l’âge moyen au début de l’étude étant de 75 ans.

 

Référence : Meroño T, Zamora-Ros R, Hidalgo-Liberona N, Rabassa M, Bandinelli S, Ferrucci L, Fedecostante M, Cherubini A, Andres-Lacueva C. Animal protein intake is inversely associated with mortality in older adults: the InCHIANTI study. J Gerontol A Biol Sci Med Sci. 2021 Nov 27:glab334.

 

Source : J Gerontol A Biol Sci Med Sci

 

 

[1] L’exemple le plus explicite est celui de l’observation des avions militaires revenus de combat criblés de balles : contre intuitivement, il convient de blinder les zones non endommagées (car quand ces zones ont été touchées, l’avion n’est pas rentré) et non celles les plus endommagées (car cela ne les a pas empêché de rentrer à bon port).

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