Les prairies, alliées de choix pour un élevage durable (Article de synthèse)

Effets bénéfiques sur l’environnement, la santé, le bien-être animal… : les prairies répondent à bien des égards aux attentes de la société et ont toute leur place dans les systèmes d’élevage herbivores de demain. Un récent article publié par INRAE  propose un état des lieux des connaissances nouvelles et des innovations en termes d’outils de gestion des prairies, au regard de l’évolution des enjeux de l’élevage de ruminants en zone tempérée.

Surfaces agricoles dont la végétation est utilisée pour la production de fourrage à récolter et/ou pour le pâturage d’animaux d’élevage, les prairies bénéficient d’une image positive pour le grand public car elles sont associées à une production considérée « naturelle », et perçues comme favorables en termes de bien-être animal, de qualité des produits animaux et de services environnementaux. Malgré les souhaits des pouvoirs publics, les surfaces en prairies permanentes ont fortement régressé depuis les années 1950 en France (-30%) comme en Europe, après avoir fortement progressé au cours du 20e siècle. Si en France, elles représentent encore environ un tiers de la surface agricole utile, leur maintien est incertain dans de nombreuses zones, soit du fait de la concurrence avec les cultures fourragères et les cultures de vente, soit parce que menacé par le changement d’usage des terres (artificialisation, friche, reforestation). En élevage, des freins techniques et économiques poussent une partie des éleveurs à s’en désintéresser (rendements fourragers trop faibles, valeur alimentaire instable, complexité de gestion…). Toutefois, de nombreux travaux conduits depuis plusieurs décennies alimentent les connaissances dans l’objectif d’optimiser et de favoriser l’intégration des prairies dans les systèmes de production. Des chercheurs d’INRAE publient une synthèse de ces études, en les analysant au regard de l’évolution des enjeux de l’élevage de ruminants en zone tempérée.

De multiples services rendus et de nouvelles connaissances…

Dans cette synthèse, les auteurs proposent un état des lieux des connaissances sur les effets bénéfiques des prairies pour :

  • produire du lait et de la viande ;
  • préserver et améliorer l’environnement ;
  • améliorer la santé des consommateurs, la santé et le bien-être des animaux et la qualité des produits ;
  • et enfin, résister aux aléas climatiques et économiques et réduire les coûts de production.

Cet état des lieux montre que les connaissances sur le fonctionnement des prairies et leur gestion ont fortement progressé ces dernières années. De nombreuses références ont été acquises en termes de production et de valeur alimentaire pour différents cycles de végétation, et servent de base au développement d’outils d’aide à la gestion des prairies (lire encadré).

Les connaissances se précisent également concernant les effets sur l’environnement, sur la santé des animaux ou encore sur la qualité nutritionnelle et organoleptique des produits animaux. Les auteurs rapportent enfin des perspectives encourageantes pour la résilience des systèmes de production face aux aléas climatiques et économiques.

… qui restent à quantifier …

Ces bénéfices sont désormais connus mais il reste à les approfondir, et notamment à les quantifier. Si l’on connaît bien les bénéfices environnementaux  par exemple (limitation de l’érosion des sols, régulation des flux d’eaux, filtration des polluants, stockage de carbone…), on ne sait pas encore les traduire en termes économiques. Côté bien-être animal, les prairies sont également sources de bénéfices, non quantifiés à ce jour, tant sur le plan comportemental que sur celui de la santé. « Une piste de recherche importante puisqu’elle constituerait un argument supplémentaire pour les valoriser dans les systèmes de production », commentent les auteurs.

… et à valoriser

Outre les connaissances à approfondir, les auteurs soulignent aussi la nécessité de mieux faire connaître et reconnaître les atouts des prairies, notamment auprès des éleveurs eux-mêmes. Et de conclure : « (La) place (des prairies) dans la réforme de la politique agricole commune est à défendre pour que ces systèmes aux multiples vertus soient reconnus et rémunérés aussi pour les aménités nombreuses auxquelles ils sont associés. »

 

L’acquisition de références permet d’alimenter des outils d’aide à la gestion des prairies pour les éleveurs

Si la très grande diversité des prairies temporaires et permanentes a compliqué l’acquisition des connaissances, on connaît bien aujourd’hui les déterminants et les caractéristiques de leur production. Les connaissances se sont ainsi affinées sur les facteurs clés de leur composition, de leur croissance et de leur qualité. On en sait davantage aussi sur les espèces prairiales : caractéristiques, fonctionnement, valeur fourragère, sensibilité aux fertilisants et aux types de sol… Cet ensemble de références permet d’alimenter des outils d’analyse à destination des éleveurs, pour les aider à mettre en valeur les prairies dans leur système de production. De nombreux outils existent aujourd’hui, proposant différentes échelles d’analyse : celle du troupeau ou de la parcelle, du système de pâturage, du système fourrager, ou encore de l’exploitation agricole.

 

Référence : Michaud A. et al. (2021). Les prairies, une richesse et un support d’innovation pour des élevages de ruminants plus durables et acceptables. INRAE Productions Animales, 33(3), 153–172.

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