Sensibilité des animaux au SARS-CoV-2 : où en est-on des connaissances ?

L’Académie nationale de médecine et l’Académie vétérinaire de France publient un avis relatif à la sensibilité des différentes espèces animales au SARS-CoV-2, virus responsable de la Covid 19. Ce document revient sur les contaminations inter-espèces rapportées depuis le début de la pandémie et donne des recommandations pour optimiser la gestion de cette crise sanitaire.

L’apparition de la Covid-19 dans la ville chinoise de Wuhan fin 2019 a écrit un nouvel épisode dans l’histoire des zoonoses, ces maladies transmissibles de l’animal à l’Homme, et réciproquement. Bien que le virus responsable, baptisé SARS-CoV-2, affecte essentiellement l’être humain, différentes espèces animales, dont notamment les visons d’élevage, s’avèrent sensibles à l’infection. Un avis de l’Académie nationale de médecine et de l’Académie vétérinaire de France fait le point.

Des contaminations en conditions naturelles et expérimentales ?

Le virus SARS-CoV-2 a émergé d’un réservoir animal, la chauve-souris fer à cheval, et a été transmis à l’Homme via un hôte intermédiaire encore indéterminé, l’hypothèse du pangolin n’ayant pas été démontrée avec certitude. Des contaminations de l’Homme vers l’animal ont par la suite été documentées en conditions naturelles ou expérimentales.

Ainsi, depuis le premier cas avéré de contamination d’un chien par son propriétaire à Hong Kong fin février 2020, de nombreuses infections animales d’origine humaine ont été rapportées à travers le monde : chiens et chats appartenant à des propriétaires porteurs du SARS-CoV-2, mais aussi animaux sauvages vivant en captivité (tigres, lions, pumas…). Aucun cas de contamination naturelle n’a été rapporté chez les animaux domestiques d’élevage (bovins, ovins, porcs, volailles).

En conditions expérimentales, les scientifiques ont démontré la sensibilité* du furet, du chat et dans une moindre mesure, du chien et du lapin au SARS-CoV-2. Les bovins semblent très peu sensibles : dans une étude allemande menée sur 6 animaux infectés expérimentalement, le virus ne s’est répliqué que chez un tiers des animaux, l’infection n’étant pas contagieuse entre individus. Quant aux porcs et aux volailles, ils s’avèrent résistants à toute inoculation par le SARS-CoV-2.

Le cas particulier du vison d’élevage

Avec la pandémie de Covid-19, un autre animal d’élevage s’est retrouvé sous le feu des projecteurs : le vison. Dans les fermes caractérisées par de fortes densités d’animaux, élevés dans des bâtiments fermés, le coronavirus introduit via le personnel infecté a rapidement contaminé la totalité des visons. Fait unique et préoccupant : la transmission virale avérée du vison vers l’Homme dans ces élevages, avec des cas rapportés parmi le personnel et les personnes vivant à proximité des exploitations.

Au Danemark, 1er producteur mondial de visons avant la pandémie, l’inquiétude est montée d’un cran début septembre 2020, du fait de la mise en évidence de mutations génétiques chez certains SARS-CoV-2 isolés dans les élevages de visons et chez des humains contaminés. Bien que ces virus variants ne possèdent pas une pathogénicité ou une contagiosité accrues, des études suggèrent une moindre activité des anticorps anti-SARS-CoV-2 contre un variant baptisé DFVI-spike, faisant craindre un échec des futurs vaccins.

En l’absence de données scientifiques précises évaluant le risque réel des virus variants pour la santé publique, le principe de précaution a prévalu, menant à la décision d’abattage total des élevages de visons infectés.

Les préconisations des scientifiques

A l’exception des visons d’élevage, aucune transmission du SARS-CoV-2 de l’animal à l’Homme n’a été décrite jusqu’à présent. D’après les données scientifiques actuelles, les autres animaux ne contribuent pas à la propagation de la Covid-19, même si les scientifiques n’excluent pas l’hypothèse inquiétante d’une recombinaison entre le SARS-CoV-2 et un coronavirus félin ou canin pathogène.

L’Académie nationale de médecine et l’Académie vétérinaire de France recommandent donc d’élargir la surveillance menée actuellement dans les fermes de visons aux autres espèces (domestiques et sauvages), et de renforcer les mesures de biosécurité recommandées vis-à-vis des animaux (éviter tout contact entre les personnes infectées par le SARS-CoV-2 ou suspectes de l’être et leurs animaux de compagnie, et observer les mesures barrière classiques comme le lavage des mains et le port de masques…). Autres mesures préconisées : la réalisation d’études supplémentaires évaluant les risques liés au virus variant DFVI-spike, et la surveillance de toute nouvelle mutation du SARS-CoV-2.

Enfin, les Académies prônent l’amélioration de la coordination entre les secteurs de la santé humaine et animale (approche « Une seule santé »), afin de développer des stratégies efficaces de lutte contre la pandémie de Covid-19.

*La sensibilité se définit comme la capacité d’un virus à contaminer et à se répliquer dans une espèce donnée.

Source : SARS-CoV-2 : sensibilité des espèces animales et risques en santé publique. Avis de l’Académie nationale de médecine et de l’Académie vétérinaire de France. 

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