Préserver la qualité des sols agricoles grâce à des pratiques agroécologiques (Article de synthèse)

Alors que le dernier rapport du GIEC1 souligne la nécessité de préserver nos sols pour atténuer le changement climatique, selon les experts de l’Ademe2, une prise de conscience et une sensibilisation quant à l’évolution des pratiques vers l’agroécologie s’avèrent indispensables.

« Les sols sont bien plus que de simples surfaces que l’on foule et exploite, ils sont vivants et constituent l’un des leviers majeurs de la transition écologique ! », souligne Antoine Pierart, ingénieur au service Forêt, alimentation et bioéconomie de l’Ademe. Supports de l’agriculture, et à l’origine de 95 % de nos aliments, les sols ont aussi la capacité d’épurer l’eau et de séquestrer des quantités très importantes de carbone. « Entre 1 500 et 2 400 milliards de tonnes de carbone sont stockées dans la matière organique enfouie dans le sol partout dans le monde », indique l’expert. Et certains auraient même la capacité d’en stocker davantage. Pourtant, si ces surfaces agricoles participent à l’atténuation du changement climatique, leur qualité d’absorption se constitue sur des milliers d’années, et sans attention de notre part, ces surfaces peuvent très vite se dégrader. Aussi, il est nécessaire de sensibiliser les personnes les moins averties aux enjeux de la qualité des sols, pour que la prise de conscience se généralise.

Prévenir la dégradation des sols

On estime qu’à l’échelle mondiale, 41 % des sols cultivés sont dégradés. Érosion, artificialisation, pollution, tassements, pertes en matières organiques et en biodiversité sont autant de causes possibles de leur dégradation qui résulte, la plupart du temps, d’activités humaines. Certaines pratiques culturales rendent en effet les sols plus vulnérables, à l’instar de la suppression des arbres et des haies ou de l’emploi de produits de traitement.

« Bien connaître son sol permet de limiter les intrants sans risquer de perte de rendement », explique Isabelle Feix, experte nationale ‘sol’ de l’Ademe. Elle recommande de « sortir de la spécialisation de grandes régions agricoles, qui épuise les sols ou les sature, pour aller vers l’agroécologie, qui les régénère ». Elle invite donc à réduire les intrants, à remettre des haies, des arbres, à diversifier les cultures, et à épandre les matières organiques, afin de régénérer un cercle vertueux : « Un sol en bonne santé peut réguler certains germes pathogènes et diminuer les risques de maladie, il est aussi plus résilient aux aléas climatiques et stocke mieux l’eau », souligne la spécialiste.

Examiner les sols et les réparer grâce à l’agriculture

Si l’agriculture est souvent pointée du doigt pour ses impacts sur l’environnement, elle est, en réalité, porteuse de solutions pour améliorer la qualité des sols. « L’observation du sol est au cœur du métier des agriculteurs, qui sont les dépositaires et les gardiens de cette ressource précieuse », affirme Thomas Eglin, ingénieur sol et environnement à l’Ademe.

Pour examiner la qualité des sols, les agriculteurs disposent d’une palette d’indicateurs variés : teneurs et disponibilité en éléments nutritifs, matières organiques, porosité, étude de la biomasse et même le comptage des vers de terre ! Et pour protéger les sols, ils disposent également de plusieurs leviers d’action : amendements, rotations de culture, limitation des labours, réduction des intrants, couverts intermédiaires. « En protégeant les sols, les agriculteurs protègent notre patrimoine commun », rappelle Thomas Eglin.

Stocker du carbone dans les sols est un des leviers d’action des agriculteurs. Au passage, les sols y gagnent en fertilité. Par contrat, 250 producteurs de maïs pour Nataïs se sont engagés à planter des cultures intermédiaires, telles que des féveroles, légumineuses qui fixent le carbone atmosphérique et restaurent le sol en matières organiques. Éric Ceschia, directeur de recherches Inrae au Centre d’études spatiales de la biosphère (Cesbio), développe avec son équipe, un outil opérationnel permettant de calculer le bilan carbone de ces cultures au moyen d’observations par satellite. Grâce à cet outil, le groupe Nataïs pourra évaluer les bonnes pratiques des agriculteurs, et même bientôt les rémunérer en fonction de la tonne de carbone séquestrée. Une belle récompense pour ces agriculteurs, conscients de la ressource précieuse que constituent leurs sols.

1. Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’évolution du climat

2. Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie

Source : Ademe : Quel avenir pour les sols ? 3 questions à Antoine Pierart et Ademe&Vous N°132, Sols agricoles : une ressource précieuse.

 

 

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