Consommation des viandes rouges : un léger redressement dans une tendance baissière (Article de synthèse)
Dans la dernière synthèse relative à la consommation de viandes en France en 2022, publiée par FranceAgriMer et le ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire en juillet 2023, la consommation globale des viandes augmente de 0,8 %. Dans le détail, la viande de poulet progresse, la viande porcine reste stable, tandis que les consommations de viandes bovines et ovines se redressent légèrement, respectivement de 1,0% et 2,4%, dans une tendance de forte diminution depuis 2012. Les importations quant à elles augmentent fortement, dépassant largement les niveaux d’avant-Covid, et représentent désormais en moyenne 30 % des consommations, toutes viandes confondues. A l’inverse, les achats des ménages se réduisent fortement montrant un fort retour post-covid de la restauration hors domicile.
En 2022, la consommation de viande bovine en France a légèrement augmenté de 1,0 % par rapport à 2021, mais n’a pas retrouvé son niveau de 2019, indiquant une tendance à la baisse à long terme (baisse moyenne de 0,5 % par an entre 2012 et 2022). Elle représente désormais 26 % de la consommation totale de viande, classant la viande bovine au troisième rang derrière la viande de poulet, qui a augmenté de 4,7 % en 2022, et ce malgré la crise de l’influenza aviaire. Les importations de viande bovine, provenant en grande partie de l’Union européenne, ont fortement augmenté sur cette même année (+ 22,9 %), concernant les viandes fraîches, congelées et les préparations. La consommation de viande porcine a augmenté pour la deuxième année consécutive (+ 1,6 %) et représente toujours la viande la plus consommée en France, avec une part de 38 %. La consommation de viande ovine rebondit quant à elle en 2022 (+ 2,4 %), mais reste en baisse de 20 % par rapport à 2012. Elle représente 2,6 % des viandes consommées par les Français et est à 54 % importée, principalement du Royaume-Uni.
Tendance flexitarienne ou changement de lieux de consommation ?
Pour mieux comprendre les tendances de consommation de viandes en 2022, FranceAgriMer et le ministère de l’Agriculture ont également utilisé les données de Kantar Worldpanel, qui se concentrent sur les achats de viandes effectués par les ménages pour leur consommation à domicile. Ainsi, les achats de viandes de boucherie ont connu une baisse moyenne de 4,2 % en volume, tandis que les prix ont augmenté de 5,2 %. En détail, les viandes bovines et ovines ont été plus durement touchées que les viandes de porc, de jambon et de charcuterie, qui ont connu une inflation moins marquée et dans des formats pratiques. Les chiffres de consommation à domicile diffèrent considérablement des chiffres globaux montrant une hausse de la consommation apparente des viandes. Dans une analyse réalisée par le Think-Tank Agridées et au-delà des différences méthodologiques entre Kantar et la consommation apparente, Yves Le Morvan, responsable Filières et Marchés, émet l’hypothèse que les consommateurs ont réduit leurs achats et consommations domestiques, poussés par l’inflation alimentaire et éventuellement une pensée flexitarienne. Ils ont cependant consommé de la viande à l’extérieur, en restauration hors domicile – notamment en restauration rapide – proposant une offre large et abordable, s’appuyant sur des importations. L’Institut de l’élevage (Idele) a ainsi estimé que 24 % des volumes de viande bovine produite et importée en France en 2017 étaient consommés en restauration. C’est une tendance qui existait déjà avant le Covid. Pour Agridées, « une tendance se confirmera probablement en 2023 : la substitution progressive des viandes blanches aux viandes rouges, et le risque global d’un recours accru aux importations à l’encontre de productions territoriales ».
Source : FranceAgriMer
Comprendre les différents types de données dites « de consommation »
En consultant diverses sources de données présentant des estimations des niveaux de consommation, vous avez peut-être déjà eu l’impression que les chiffres ne correspondaient pas, voire qu’ils se contredisaient. À l’origine de ces disparités : les différentes méthodes utilisées pour estimer des quantités dites « consommées ». Stricto sensu, seules les enquêtes de consommation alimentaire, comme celles réalisées pour les études CCAF (Crédoc) ou INCA (Anses) en France, sont destinées à mesurer précisément les consommations alimentaires individuelles. Elles s’appuient en général sur des rappels de 24 h (répétés plusieurs fois), des questionnaires de fréquences ou des carnets de consommation de 7 jours, dans lesquels les sujets indiquent de façon la plus détaillée possible tous les aliments et boissons consommés au cours de la journée en estimant leurs quantités. Ces données sont les plus proches des consommations réelles des individus. Ce sont les données utilisées en nutrition notamment pour caractériser les régimes alimentaires des populations.
Compte tenu de la lourdeur méthodologique de ce type d’enquêtes, des approches indirectes, plus pratiques mais moins précises, sont utilisées pour estimer les consommations. Elles permettent notamment de procéder à des comparaisons annuelles ou entre pays. Dans cette synthèse de FranceAgriMer, deux outils « indirects » ont été utilisés pour évaluer la consommation de produits carnés.
Outils indirects pour évaluer la consommation de produits carnés
Le premier correspond au calcul par bilan, qui consiste à évaluer la disponibilité nationale des viandes pour l’alimentation humaine. Le calcul s’effectue selon la formule suivante : Consommation = abattages + importations – exportations ± variations de stocks. En divisant par le nombre d’habitants, on obtient une consommation « apparente ». Toutefois, ces données représentent la production de viandes destinées à la consommation et non la consommation des individus à proprement parler. Cette consommation apparente se base sur le poids des carcasses au stade de la pesée en abattoir et comptabilise donc les os et le gras qui ne sont pas consommés. À titre d’exemple pour la viande bovine, l’Institut de l’élevage (Idele) a estimé le rendement carcasse moyen à environ 70 %. Un coefficient de cet ordre de grandeur devrait donc être appliqué pour se rapprocher des consommations réelles.
Le second outil indirect d’évaluation correspond aux achats effectués par les ménages pour leur consommation à domicile relevés auprès d’un panel de consommateurs représentatifs de la population française. Ce calcul ne porte donc que sur une partie de la consommation. Il ne couvre pas, par exemple, la consommation de viande dans le cadre de la restauration hors domicile, ou bien celle relevant d’ingrédients dans les plats préparés (e.g. lardons dans les quiches). De plus, il s’agit de données par ménage et non par individu.
À noter enfin que ces deux indicateurs de consommation ne tiennent pas non plus compte du gaspillage et des pertes diverses susceptibles d’intervenir après la commercialisation ou l’achat des produits.
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