Qualité de la législation européenne sur le bien-être animal : un bilan mitigé entre progrès accomplis, distorsions de concurrence et évolution des attentes sociétales (Article de synthèse)

La Commission Européenne a publié en octobre 2022 un bilan de la qualité de la législation communautaire sur le bien-être animal. Si ce document souligne les progrès accomplis en matière de protection des animaux de rente, il met aussi en lumière les difficultés d’harmonisation à l’échelle européenne et le décalage avec les préoccupations sociétales actuelles.

 C’est un engagement de la Commission Européenne dans le cadre de la stratégie Farm to Fork : réviser la législation communautaire sur le bien-être animal d’ici le second semestre 2023. La Commission a donc entrepris, dans le cadre de ce vaste chantier, de dresser un bilan de la qualité de la législation en vigueur sur ce sujet. Objectif : évaluer la pertinence, l’efficacité et la cohérence des règles européennes en matière de bien-être animal. Les sept textes législatifs* relatifs à la protection des animaux de rente ont ainsi été examinés. Des consultations ciblées des parties prenantes (entreprises du secteur alimentaire, agriculteurs, ONG, pouvoirs publics) et du grand public ont été menées au sein de l’Union Européenne (UE) et dans certains pays tiers entre octobre 2021 et janvier 2022. Au total, près de 60 000 contributions ont été recueillies. Le bilan de ces travaux a été publié en octobre 2022.

Amélioration du bien-être animal

Premier enseignement : la législation européenne a bien contribué à l’amélioration du bien-être animal, notamment dans les productions visées par des actes législatifs ciblés (porcs, veaux, poulets de chair et poules pondeuses). Entre autres bénéfices collatéraux, le bilan met en avant la diminution du recours aux antibiotiques, l’amélioration de la qualité de la viande et in fine de la santé publique. En matière de protection animale toutefois, des progrès restent à accomplir. La législation actuelle autorise ainsi l’élevage dans des logements confinés, qui limitent les mouvements des animaux (veaux, porcs, poules pondeuses) et nuisent à leur bien-être. Certaines espèces, comme les bovins laitiers et allaitants ou les poissons d’élevage, ne font toujours pas l’objet d’une législation ciblée. Les contrôles de l’application de la législation sont globalement jugés insuffisants, notamment pour les voyages de longue durée et le transport d’animaux gravides.

Distorsions de concurrence

Sur le plan commercial, la législation européenne vise une concurrence plus équitable entre les agriculteurs et les professionnels du secteur alimentaire des différents Etats membres. Or, si les textes contribuent à l’instauration de conditions égales dans l’UE, leur mise en œuvre reste insuffisante par endroits. En cause ? L’imprécision de certaines dispositions législatives, et des disparités dans la transposition des directives européennes au niveau national. Ces différences d’application et de contrôle du respect de la législation génèrent des distorsions de concurrence au sein de l’UE. A cela, s’ajoute la concurrence extra-européenne, liée à l’incohérence entre le cadre législatif communautaire et les importations de denrées animales produites selon des standards de bien-être inférieurs.

Attentes croissantes des citoyens

Sur le plan sociétal enfin, ce bilan souligne les discordances entre la législation actuelle et les attentes croissantes des citoyens. Ainsi, pour 92 % des participants à la consultation, les textes en vigueur ne garantissent pas une protection animale adéquate dans l’UE. Une écrasante majorité (95 %) se prononce pour une limitation de la durée de transport des animaux. Ou contre l’exportation d’animaux vivants vers les pays tiers à des fins d’abattage. L’abandon progressif de l’élevage en cage (poules pondeuses, poulets de chair, veaux, lapins…) fait également l’unanimité parmi les consommateurs européens. La révision de la législation communautaire devrait donc tenir compte de leurs attentes, tout en prêtant une oreille attentive aux producteurs qui dénoncent, de leur côté, des rémunérations insuffisantes pour les aliments produits selon les normes de bien-être plus élevées.

* Directive 98/58/CE du Conseil du 20 juillet 1998 concernant la protection des animaux dans les élevages («directive sur les élevages»), Directive 1999/74/CE du Conseil du 19 juillet 1999 établissant les normes minimales relatives à la protection des poules pondeuses («directive sur les poules pondeuses»), Directive 2007/43/CE du Conseil du 28 juin 2007 fixant des règles minimales relatives à la protection des poulets destinés à la production de viande («directive sur les poulets de chair»),  Directive 2008/119/CE du Conseil du 18 décembre 2008 établissant les normes minimales relatives à la protection des veaux («directive sur les veaux»), Directive 2008/120/CE du Conseil du 18 décembre 2008 établissant les normes minimales relatives à la protection des porcs («directive sur les porcs»), Règlement (CE) nº 1/2005 du Conseil du 22 décembre 2004 relatif à la protection des animaux pendant le transport («règlement sur les transports»), Règlement (CE) nº 1099/2009 du Conseil du 24 septembre 2009 sur la protection des animaux au moment de leur mise à mort («règlement sur la mise à mort»).

 Sources : Commission Européenne

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