La Société Française de Pédiatrie signe un édito dédié au végétarisme de l’enfant et de l’adolescent (Article de synthèse)

Plusieurs membres du Comité de Nutrition de la Société Française de Pédiatrie (CNSFP) cosignent un éditorial dans la revue Archives de Pédiatrie sur la question du végétarisme de l’enfant. Ils y rappellent les bénéfices de tels régimes mais aussi leurs risques nutritionnels, les limites des études des bénéfices cardiovasculaires observés chez l’adulte, et le manque de données chez l’enfant.
Le régime végétarien est à la mode et concernerait de l’ordre de 5 % des adultes des pays développés et, par conséquent, leurs enfants : 0,4 % des Français de moins de 17 ans suivraient un régime végétarien, contre 1,8 % des adultes. Chez les enfants, le régime végétarien doit être particulièrement bien conçu pour éviter des risques de déficit en fer, calcium, vitamine D, acides gras omega-3 et vitamine B12 notamment. Pour autant, la prévalence de l’obésité et du diabète de type 2 (DT2) augmentant également pendant l’enfance, la question du bénéfice potentiel à long terme d’un régime végétarien chez les moins de 18 ans se pose. En effet, chez les adultes, un régime végétarien est associé à un risque plus faible d’obésité, de maladies cardiovasculaires et de DT2 ; néanmoins il serait également associé à un risque plus élevé d’accident vasculaire cérébral hémorragique.
Des données à relativiser chez l’adulte
Attention toutefois à ne pas tirer de conclusions hâtives des études observationnelles. Comme le rappellent les auteurs, de multiples facteurs nutritionnels peuvent expliquer les effets cardiométaboliques bénéfiques des régimes à base de plantes : apport énergétique plus faible, réduction de la consommation de graisses saturées et de cholestérol, apport plus élevé de fibres, stérols végétaux, acides gras poly- et mono-insaturés antioxydants, certains autres micronutriments et protéines végétales. En outre, un régime végétarien peut affecter le poids corporel en augmentant le métabolisme de base : la dépense énergétique au repos des végétariens serait plus élevée que chez les non végétariens, et semble positivement corrélée à une composante spécifique du régime végétarien, à savoir les graisses végétales. Par ailleurs, les avantages d’un régime végétarien peuvent être dus à l’évitement de nutriments, comme ceux contenus dans la viande transformée : cette dernière est en effet associée à un risque plus élevé de maladie cardiovasculaire et de DT2, et à une augmentation de la mortalité toutes causes confondues et des accidents vasculaires cérébraux (ces deux derniers effets étant également observés en cas de consommation excessive de viande rouge).
De plus, les biais de sélection et les facteurs confondants (style de vie, etc.) peuvent également contribuer aux avantages apparents d’un régime végétarien signalés chez les adultes, qui reposent uniquement sur des études d’observation. En effet, le régime végétarien est souvent associé à un mode de vie plus sain : évitement du tabac et de l’alcool, et/ou davantage d’exercice physique…
Enfin, tous le régimes végétariens ne se valent pas : une récente méta-analyse souligne certes qu’un régime alimentaire à base de plantes est associé à une réduction du risque de maladie coronarienne ; néanmoins, la corrélation s’avère plus forte pour un « régime alimentaire végétal « sain » (céréales complètes, fruits et légumes, noix et légumes secs, huiles, thé et café) par opposition à un régime alimentaire riche en aliments végétaux jugés « non sains » (jus et boissons sucrées, céréales raffinées, pommes de terre frites et sucreries).
Peu de données chez les moins de 18 ans
En conclusion, si, chez les adultes, un régime végétarien semble de prime abord plutôt bénéfique notamment sur le plan cardiométabolique, les mécanismes sous-jacents sont nombreux et les enfants ne sont pas des adultes : les besoins nutritionnels nécessaires à leur croissance et au développement neurologique doivent être satisfaits. Or les données sur les conséquences d’un régime végétarien chez les enfants sont rares et hétérogènes, et obtenues sur des échantillons de petite taille. De plus, théoriquement, un régime végétarien expose l’individu à un risque de carence nutritionnelle, en particulier chez les nourrissons, les tout-petits, les adolescentes et les femmes enceintes. La prudence reste donc de mise, d’autant qu’aucun bénéfice cardiométabolique n’a encore été démontré chez les enfants suivant ce type de régime. Dans ce contexte, les auteurs estiment que le « flexitarisme » pourrait être une approche intéressante pour réduire le risque de maladies cardiovasculaires sans augmenter le risque de carence nutritionnelle.
Source : N. Peretti, D. Darmaun, J.P. Chouraqui, A. Bocquet, A. Briend, F. Feillet, M.L. Frelut, D. Guimber, R. Hankard, A. Lapillonne, J.C. Rozé, U. Simeoni, D. Turck, C. Dupont, Comité de Nutrition de la Société Française de Pédiatrie (CNSFP). Vegetarian diet in children and adolescents: A health benefit? Archives de Pédiatrie. 2020. 27 (4):173-175.
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