Un additif testé pour réduire le méthane des effluents (Article de Synthèse)

L’élevage produit des gaz à effet de serre, notamment du méthane, à la fois par la fermentation entérique des ruminants mais aussi par les effluents d’élevage. Ces derniers émettent également de l’ammoniac qui est un polluant atmosphérique. Ces deux gaz s’échappent notamment lors du stockage des excréments des animaux. Une étude publiée dans le numéro 161 de Waste Management montre qu’il est possible de réduire à ce niveau les émissions de méthane de 99 % par un additif au lisier, le cyanamide de calcium (CaCN2). Cette méthode pourrait apporter une contribution importante à la lutte contre le changement climatique en agriculture.
Depuis que le méthane a été identifié comme principal gaz à effet de serre GES) émis par l’élevage, non seulement lors de la fermentation entérique des ruminants, mais aussi lors du stockage et de l’épandage des effluents, la recherche s’active pour trouver des solutions pour le réduire et, dans le même temps, éviter les pertes de carbone. Car tout carbone perdu dans l’air représente une perte en termes de croissance de l’animal et de fertilisation des cultures. Pendant le stockage durant les mois d’hiver et avant épandage à la bonne saison, le lisier est en effet transformé par des champignons et bactéries. D’après l’article, 50 % du méthane de l’élevage provient ainsi des effluents. Le cyanamide de calcium (CaCN2) est utilisé en agriculture depuis plus d’un siècle comme engrais azoté ayant des caractéristiques d’inhibition de la nitrification et de lutte contre les parasites. Dans cette étude, le CaCN2 a été utilisé en laboratoire comme additif sur le lisier de porcs à l’engraissement et de vaches laitières, afin d’évaluer son effet en tant qu’inhibiteur de bactéries sur l’émission d’ammoniac et de GES. Les résultats sont prometteurs puisque la production de méthane s’en est trouvée presque complètement arrêtée. Par ailleurs, le procédé est peu coûteux : de l’ordre de 0,3 à 0,5 centime par litre de lait pour l’élevage bovin.
99 % de réduction d’émissions de GES
Dans l’expérimentation en laboratoire, le lisier stocké a été traité avec 300 mg/kg- ou 500 mg/kg d’une formulation de CaCN2 à faible teneur en nitrates (Eminex®). Puis, le lisier a été stocké pendant plus de 6 mois au cours desquels le volume et la concentration de gaz ont été mesurés. La suppression de la production de méthane par le CaCN2 a commencé environ 45 minutes après l’application et a persisté pendant 12 à 26 semaines, voire plus en fonction du dosage. Les résultats montrent une réduction des émissions totales de GES de ces effluents de 81 à 99 %. Le mécanisme sous-jacent est lié à l’inhibition par l’additif CaCN2 de la dégradation microbienne des acides gras volatils (AGV) et de leur conversion en méthane. Ainsi, la concentration d’AGV dans le lisier augmente ce qui abaisse son pH et réduit indirectement les émissions d’ammoniac. La substance présente également d’autres avantages : elle enrichit le lisier en azote et améliore ainsi son effet fertilisant. Il sera nécessaire d’étendre l’expérimentation au-delà des conditions de laboratoire pour vérifier comment l’additif réagit en réponse à la diversité microbienne présente dans les lisiers et clarifier ses effets sur l’ammoniac. Enfin, l’utilisation d’un tel additif nécessitera une évolution réglementaire puisqu’il est actuellement interdit sur effluents dans certains pays, comme en Allemagne.
Référence : Felix Holtkamp, Joachim Clemens, Manfred Trimborn. Calcium cyanamide reduces methane and other trace gases during long-term storage of dairy cattle and fattening pig slurry. Waste Management, 2023; 161: 61.
Sources : Waste Management ; Science Daily.
À voir aussi
-
Environnement2 octobre 2025
Le continuum sol-plante-animal-homme : une alimentation plus saine grâce aux prairies (TRADUCTION)
Face aux préoccupations croissantes sur l’impact environnemental et sanitaire de la viande bovine, une équipe de chercheurs a comparé les systèmes de finition à l’herbe et aux grains dans le sud des États-Unis. Résultat : les pâturages présentent des sols plus riches en matière organique et minéraux, des plantes chargées en antioxydants, et une viande… -
Environnement2 octobre 2025
Pâturage régénératif : un levier pour restaurer la santé des sols et renforcer la durabilité des écosystèmes (TRADUCTION)
La santé des sols conditionne la productivité agricole et la résilience des écosystèmes, en particulier face aux défis d’une population mondiale croissante. Cette étude analyse l’effet des écorégions, de la saisonnalité et des modes de gestion du pâturage sur la qualité et la productivité des sols. Les résultats montrent que le pâturage régénératif favorise une… -
Environnement2 octobre 2025
Systèmes intégrés cultures–bétail–forêt : un levier pour améliorer la stabilité des sols et le stockage du carbone au Brésil (TRADUCTION)
En comparant sur le long terme différents modes d’usage des terres au Brésil, cette étude met en évidence le rôle clé des systèmes d’intégration cultures–bétail–forêt (SICBF) dans la séquestration du carbone organique du sol (COS) et la formation de macro-agrégats stables. Les résultats montrent que les SICBF, en rotation pâturée ou cultivée, offrent un potentiel…