Rôle prépondérant du fer héminique dans la cancérogénèse du côlon

Selon ces chercheurs, le fer héminique serait le principal facteur responsable de la promotion du cancer du côlon en lien avec les consommations élevées de viandes rouges (dont celles de charcuterie) via son action sur la formation d’aldéhydes. Contexte : Les données épidémiologiques observent une association entre les consommations élevées de viandes rouges (dont la viande rouge transformée : charcuterie, etc.)  et une augmentation du risque de cancer colorectal. Plusieurs hypothèses mécanistiques sont étudiées – le fer héminique, les amines hétérocycliques et les composés N-nitrosés (NOC) notamment – mais leur contribution respective n’est pas connue. Objectifs : Les auteurs ont tenté de déterminer à des doses nutritionnelles en modèle animal, lequel de ces facteurs est le plus impliqué et ont cherché à proposer un mécanisme pour la promotion du cancer colorectal par une consommation élevée de viande rouge. Méthodologies : Les contributions du fer héminique (1% du régime), des amines hétérocycliques (PhIP+MeIQx, 50+25 µg/kg dans le régime) et de NOC (induit pas NaNO2+NaNO3 0.17+0.23g/l de boisson) ont été déterminées par modélisation factorielle et par les paramètres prénéoplasiques rapportés dans les cas de tumeurs induites chimiquement sur des rats et des souris Min. 80 rats et 45 souris (Apc min/+ et Apc +/+ – une mutation fréquente dans les cancers du côlon humain) ont suivi 49 jours de ce régime expérimental. Les mécanismes moléculaires (génotoxicité, cytotoxicité) étaient analysés in vitro dans des lignées cellulaires normales et dans des lignées déficientes en Apc puis confirmés dans la muqueuse colique. Résultats : Le régime avec le fer héminique augmentait le nombre de lésions prénéoplasiques mais ni les amines hétérocycliques ni les NOC n’avaient d’effet sur la cancérogénèse chez les rats. L’hémoglobine d’origine alimentaire augmentait la charge tumorale chez les souris Min (régime témoin : 67±39mm² ; 2.5%, régime hémoglobine : 114±47mm², p=0.004). In vitro, l’eau fécale provenant des rats ayant consommé le régime hémoglobine était riche en aldéhydes (le fer héminique catalyse la formation d’aldéhydes) et était cytotoxique pour les cellules normales, mais pas pour les cellules prémalignes. Une peroxydation lipidique luminale était induite par le régime avec hémoglobine. Les aldéhydes 4-hydroxynonenal et 4-hydroxyhexenal étaient plus toxiques pour les cellules normales que celles mutées et étaient uniquement génotoxiques pour les cellules normales. La génotoxicité était aussi observée dans la muqueuse colique de souris sous régime hémoglobine. Conclusion : Selon les auteurs, ces résultats soutiennent le rôle du fer héminique dans la promotion du cancer du côlon par une consommation élevée de viande rouge (du moins chez le rat) et suggèrent que celui-ci pourrait favoriser la formation d’aldéhydes et initier la cancérogénèse via la peroxydation lipidique. Pour eux, plutôt que se focaliser sur la cuisson, les recommandations devraient davantage s’orienter sur la quantité de fer héminique dans les régimes à base de viande et sur les moyens de réduire l’effet de l’hème par des associations au sein du régime alimentaire. Source : A central role for heme iron in colon carcinogenesis associated with red meat intake. Bastide N, Chenni F, Audebert M, Santarelli R, Tache S, Naud N, Baradat M, Jouanin I, Surya R, Hobbs DA, Kuhnle GG, Raymond-Letron I, Gueraud F, Corpet D, Pierre F. Cancer Res. 2015 Jan 15. http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/25592152

Article 39/59 du dossier "Viande, alimentation et cancer"

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