L’agroforesterie : concilier agriculture durable et performances économiques (Article de synthèse)

L’agroforesterie consiste à associer des arbres et des cultures ou des animaux sur une même parcelle. Cette pratique ancestrale est aujourd’hui mise en avant car elle favorise la restauration des sols et la biodiversité, tout en assurant des rendements satisfaisants, sur des productions agricoles diversifiées.

S’appuyant sur la complémentarité agronomique entre l’arbre et les productions au sol (cultures, maraichage, élevage, viticulture…), les systèmes agroforestiers utilisent au mieux les ressources disponibles. C’est pourquoi le recours à l’agroforesterie fait déjà partie du cahier des charges de certaines productions animales labellisées.

Des bénéfices écologiques et économiques

Apparu dans les années 70, le concept d’agroforesterie consiste à associer des arbres et des cultures ou des animaux sur une même parcelle. Un système aux multiples bénéfices.

La présence d’arbres autour ou dans une parcelle, participe en effet à restaurer la fertilité des sols (les racines captent des minéraux en profondeur, tandis que la chute des feuilles fournit de la biomasse minéralisable), à lutter contre l’érosion et l’évapotranspiration, d’où une résilience accrue contre les aléas climatiques. Les arbres fournissent un habitat favorable aux insectes auxiliaires, pollinisateurs, et autres animaux, favorisant la biodiversité.

Les espèces fixatrices d’azote, comme l’acacia, peuvent contribuer à l’alimentation azotée des cultures et ainsi réduire l’utilisation d’intrants. L’agroforesterie permet de diversifier la production (bois de chauffage, bois d’œuvre, fruitiers…) et de capitaliser sur le long terme.

Une tendance mondiale

Au cours du 4e congrès mondial d’agroforesterie organisé en France, des experts issus de plus de 120 pays ont appelé à rompre avec « la simplification et l’artificialisation récente de l’agriculture mondiale ».

Les travaux présentés par les chercheurs montrent que l’agroforesterie permet de restaurer les sols, et de faire face aux sécheresses et inondations, plus fréquentes du fait du réchauffement climatique, tout en améliorant les rendements. Cet effet peut être mesuré via la “surface équivalente assolée”, c’est‐à-dire la surface à mener en monoculture et foresterie pour obtenir la même production qu’un hectare agroforestier. Dans les zones tempérées, comme en France, ce chiffre peut atteindre 1,5 et il est parfois plus élevé en zone tropicale.

Les experts ont néanmoins souligné la nécessité d’un soutien politique et financier pour accompagner la transition agroforestière, bénéfique à long terme, mais potentiellement longue et coûteuse. « En France, le plan national de développement de l’agroforesterie lancé le 17 décembre 2015 s’organise autour de 5 axes : favoriser la recherche sur les systèmes agroforestiers, améliorer le cadre réglementaire et le soutien financier, développer le conseil et la formation dans ce domaine, améliorer la valorisation économique des productions, et promouvoir et diffuser l’agroforesterie à l’international. »

Agroforesterie et élevage

Sur les parcelles menées en agroforesterie, les haies et les arbres protègent les animaux d’un trop fort ensoleillement, impactant potentiellement la vigueur musculaire et la production laitière, mais aussi du vent et du froid qui affectent les plus jeunes. La présence d’arbres permet de lutter contre l’évapotranspiration et de faire remonter les nutriments des couches profondes du sol via leurs systèmes racinaires. Résultat : une herbe plus riche et plus appétente, et un desséchement plus tardif des prairies en été, qui permet de prolonger la période de pâturage.

Le développement de l’agroforesterie dans le secteur de l’élevage bénéficie de la création de labels de qualité. Dans l’ouest des Pyrénées Atlantiques par exemple, le cahier des charges de la production de porcs AOP Kintoa stipule que les animaux doivent être engraissés sur des parcours comportant une zone boisée et une zone de couverts de végétation. Concernant l’élevage avicole, les cahiers des charges des productions « label rouge » exigent des parcours comportant au minimum 30 arbres.

Un système encouragé par la nouvelle PAC

En France, tout agriculteur peut planter des arbres dans et autour des parcelles qu’il travaille à certaines conditions. Les parcelles agroforestières qui n’excèdent pas les 200 arbres à l’hectare sont éligibles aux aides du second pilier de la nouvelle PAC (développement rural), tandis que la présence de haies et d’arbres constitue des critères de paiement pour d’autres aides.

Déjà exigible dans certains cahiers des charges de productions labellisées, l’agroforesterie offre des perspectives économiques intéressantes dans un contexte mondial visant à réconcilier pratiques agricoles et environnementales.

Sources : Alim’agri, Inra, FAO.

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